Afrique : Entre terreur de Wagner et stratégie de prédation silencieuse de la Chine
lors que la Chine convoite avec avidité les richesses du continent africain, l’Association du Peuple Chinois pour l’Amitié avec l’Etranger (APCAE), sous couvert d’entretenir des relations amicales avec les pays africains, dissimule ses véritables intentions d’infiltrer les institutions de ces derniers.
Depuis plusieurs décennies, la Chine multiplie ses initiatives en Afrique, affichant une ambition claire : devenir un acteur incontournable sur notre continent. Cette stratégie repose sur trois piliers : la « coopération » économique, la diplomatie culturelle et l’influence politique. L’Afrique, terre généreuse débordante d’opportunités, est un atout stratégique pour Pékin. Il s’agit de sécuriser ses approvisionnements en matières premières, d’alimenter sa croissance économique et de réduire sa dépendance vis-à-vis des marchés occidentaux. Et plus encore dans un contexte de tensions croissantes avec les États-Unis.
Mais à quel prix ? Tandis que les dirigeants africains célèbrent les projets financés par la Chine, cette dernière avait pris l’habitude d’adopter une approche plutôt subtile pour s’intégrer profondément et de manière définitive dans les structures décisionnelles africaines. Au cœur de la manœuvre, l’Association du Peuple Chinois pour l’Amitié avec l’Etranger joue depuis longtemps un rôle clé. Derrière une façade prônant la « diplomatie de l’Amitié », cette organisation œuvre à asseoir les intérêts stratégiques de Pékin sur notre continent.
Pour la Chine, il ne s’agit en fait pas seulement d’établir une « coopération » économique, mais surtout de modeler les perceptions pour influencer les décisions des leaders africains en sa faveur. En apparence bienveillante, cette « amitié » pourrait bien devenir un levier pour restreindre l’indépendance de nos pays et enrichir la Chine.
Une amitié douteuse
Créée en 1954, l’APCAE se présente comme un acteur dédié à la promotion de l’amitié entre les peuples et de la coopération internationale. Officiellement, son rôle est d’établir des échanges culturels, économiques et politiques entre la Chine et d’autres nations. En apparence indépendante, elle est néanmoins profondément ancrée dans la stratégie du Front Uni, une branche du Parti Communiste Chinois (PCC) spécialisée dans l’influence et la propagande à l’étranger. Pour preuve, la représentante du Front Uni de la province du Henan, Zhu Zhenling, a prononcé le second discours de la cérémonie d’ouverture pour la semaine de formation des cadres de l’APCAE début novembre. Par ailleurs, de multiples instituts de recherche, chercheurs indépendants et gouvernements (la Jamestown Foundation, Influence Watch, Sinopsis.cz, le chercheur australien Clive Hamilton, le US National Intelligence, etc.) ont déjà alerté les « amis » de l’APCAE sur les risques d’ingérence que représentent les membres de cette association.
En effet, alors que les yeux de la communauté internationale restent tournés vers Moscou, c’est Pékin qui est désormais à la manœuvre. Et en profite pour mener une vaste démarche de prédation. En plaçant un à un, à la manière d’un joueur de GO, ses pions d’apparence anodine quand ils sont examinés de manière individuelle, mais d’une redoutable efficacité lorsqu’ils sont considérés avec un peu de recul dans leur globalité.

L’approche de l’APCAE repose sur des initiatives qui semblent inoffensives, voire bénéfiques en premier abord. En Afrique, elle tisse des liens avec les élites politiques, des leaders de la jeunesse et des responsables locaux, sous couvert de partenariats diplomatiques. Agissant comme un instrument de soft power, elle s’insère dans les cercles décisionnels africains à travers sa division Afrique-Asie dont les agents sont formés par le Front Uni pour identifier les initiatives locales à sponsoriser, les villes à jumeler et les personnalités aptes à porter leurs intérêts.

70 ans de faux semblants
Le 11 octobre 2024, la Chine célébrait en grande pompe les 70 ans de l’APCAE. Lors de cet événement à Pékin, de nombreuses personnalités officielles étaient présentes, comme l’ambassadeur et le président du Sénat du Burundi, ou encore l’ancien président du Nigéria, Olusegun Obasanjo, qui représentait l’ONG InterAction Council. Ce dernier aurait indiqué que l’ONG était « fortement alignée » et « continuerait de travailler main dans la main » avec l’APCAE.
Un positionnement étonnamment très orienté pour un organisme qui rassemble autant d’anciens dirigeants du monde entier (Etats-Unis, Russie, Mexique, Canada, Allemagne etc.). Il était également possible d’apercevoir à cette fête d’anniversaire le « maire du bonheur » du 4e arrondissement de Libreville, Axel Jesson Ayenoue, qui prend très au sérieux son poste de président de l’Association d’amitié Gabon-Chine.


Mais des figures telles qu’Olusegun Obasanjo ou Axel Jesson Ayenoue ne sont pas les seules à incarner cette génération de leaders séduits et influencés par l’approche chinoise. En effet, la Chine s’assure longue vie et prospérité en choisissant aussi ses porte-paroles dans la jeunesse de notre pays, comme Abdoul Razahagou Dene le président du Club des Jeunes pour la Promotion de la Coopération sino-burkinabè (CJPC-BF). Cette association est parrainée par l’Ambassadeur de la République populaire de Chine au Burkina Faso, SEM Lu Shan, et son président entretient des relations amicales avec le président de l’Association du Club des Amis de la Chine au Mali, Aliou Sissoko, et avec le président du Club des Amis de la Chine en Côte d’Ivoire, Rodrigue Ouakiri. D’une pierre trois coups ! Reste-t-il la moindre chance à la souveraineté de nos pays, avec un tel encerclement ?


L’amitié oui, la naïveté non !
Le président Xi Jinping, invité d’honneur des célébrations de cet anniversaire, suit personnellement les avancées de l’association et a insisté sur le « rôle unique [de l’APCAE] dans le développement de l’amitié entre les Chinois et les peuples étrangers ». Pourquoi pas ? Mais pas si cela doit se faire au détriment de l’indépendance de notre gouvernement et notre jeunesse. Rappelons le cas de l’infiltration du Parlement britannique par l’avocate Christine Lee, avec la complicité étroite de l’APCAE. Le renseignement britannique a en effet révélé que l’agent du PCC influençait secrètement la politique britannique en entretenant des relations avec les députés sous couvert de dons… amicaux.